Introduction

Les Ikantez sont « la mémoire du monde ». Du moins est-ce ainsi qu'ils aiment se présenter. Dans les temps qui suivirent la création d'Arawen, bien avant leur scission avec les Umulags, leurs ancêtres les Kazaalkans inventèrent l'écriture en traçant inlassablement des lignes dans le sable. Chaque vague emportait leurs mots et ainsi naquit l'art de la poésie éphémère. Mais certains eurent le courage de s'éloigner des eaux et dessinèrent au milieu des dunes. Les rafales des alizés déformèrent leurs écrits, faisant ondoyer les mots et les idées. Ainsi naquit l'art des contes mouvants.

Aujourd'hui les Ikantez gravent leur histoire dans l'ocre-grisâtre d'un ciment inaltérable. Leur force et leur détermination sans faille leur a permis de réaliser des prouesses architecturales et de rendre habitable des territoires hostiles situés aux portes du monde connu. Ce peuple pacifique et curieux envoie des émissaires aux quatre coins d'Arawen pour tenir à jour ses archives. Ils y consignent avec le même intérêt, l'épopée belliqueuse de grands héros contée par les meilleurs ménestrels et les récits burlesques ou avinés, glanés dans la cabane d'un montagnard éleveur de chèvres.

Au centre de leur nation-mère, une tour colossale se dresse vers le ciel comme un doigt unique et perce les nuages. Ville à l'intérieur de la ville, des milliers d'archivistes évoluent dans cette bibliothèque aux proportions titanesques. On prétend même qu'entrer dans cette citadelle du savoir sans un guide, c'est prendre le risque de s'y perdre et, faute d'en retrouver la sortie, d'y mourir de faim...